Palmarès

Prix des Écrans Documentaires

Qu’est-ce qu’on va penser de nous ? de Lucile Coda

Mention Spéciale du Jury Professionnel

La Base, Vadim Dumesh 

Prix Lycéen

Qu’est-ce qu’on va penser de nous ? de Lucile Coda

Mention Spéciale du Jury Lycéen

Désordre intérieur, de Halim Haykal

Prix Perspective du Moulin d’Andé-CECI

En communauté, de Camille Octobre Laperche

Prix Valdevy

Mamá, de Xun Sero

Mention Spéciale du Jury Valdevy

En attendant les robots, de Natan Castay


Chaque année, un jury composé de professionnel·le·s du cinéma remet le Prix des Écrans Documentaires. Nous remercions chaleureusement Callisto McNulty, Victor Zébo et Caroline Châtelet pour leur présence et leur regard. Le Prix Lycéen, remis par trois lycéen·ne·s francilien·ne·s, a été décerné par les élèves des classes cinéma du Lycée de Cachan et du Lycée Chérioux à Vitry-sur-Seine. Le Prix Perspective du Moulin d’Andé-CECI a été remis par Catherine Bizern et Adèle Lapôtre. Le Prix Valdevy a été décerné pour la première fois cette année par un jury composé de dix locataires et personnels de l’office public de l’habitat Valdevy, implanté dans six communes du Val de Marne. 

Jury Professionnel : Callisto McNulty, autrice et réalisatrice, Victor Zébo, chef opérateur de prise de vue, Caroline Châtelet, journaliste, critique (et) dramatique, programmatrice

« Parmi tous les films de la sélection 2023 deux ont particulièrement retenu notre attention. Nous avons donc décidé de remettre, outre le prix, une mention spéciale. Les deux films que nous avons choisis nous donnent à voir des réalités peu montrées, des vies souvent invisibilisées. Ce sont des films mus par une vraie prise de risque et une nécessité : celle de se confronter de façon directe aux personnes filmées et, à travers elleux, au contexte social et politique actuel. À mille lieues de rechercher le spectaculaire, bien loin de se vouloir aimable, ils nous ont bouleversé. Leur geste documentaire se nourrit de la rencontre avec l’autre et invente des espaces de réflexion, de création et d’émancipation collectives.

Nous décernons une mention spéciale au film La Base de Vadim Dumesh. Ce film collectif et polyphonique donne à voir par une accumulation assumée de fragments le fonctionnement informel et insoupçonné d’un lieu : la base des taxis de l’aéroport Roissy Charles de Gaulle. Le film remet en jeu les rapports filmeureuses-filmés en déléguant à ses protagonistes la réalisation d’une grande partie de ses images. Ces personnes nous donnent accès à cette zone d’attente tenue sciemment éloignée des regards. Elle est simultanément un lieu de repos, de jeu, de prière, d’échanges intimes, de rencontres, de jardinage comme de mobilisations politiques. Nous avons été touché·es de découvrir cet espace de solidarités et de sociabilités majoritairement masculines, immigrées et rarement montrés – sans oublier la présence forte des deux seules conductrices de taxi rencontrées par le réalisateur. Le choix des téléphones portables comme caméra nous est apparu comme un geste puissant : l’outil de travail et de contrôle est ici détourné pour donner accès à cet espace sous surveillance. Tourné sur plusieurs années, La Base nous apparaît comme un témoignage important de la prise de conscience voire même de la résistance à un bouleversement majeur du fonctionnement du travail en France : l’uberisation de la société.

Nous décernons le prix des écrans documentaires 2023 à Qu’est-ce qu’on va penser de nous de Lucile Coda. En retraversant son parcours de transfuge de classe lesbienne, sa réussite scolaire et universitaire, ses débuts professionnels dans le marketing et le choix de déserter cet avenir tout tracé pour faire du documentaire, la cinéaste s’interroge sur la honte sociale. Film concret et direct, traversé de tendresse et d’amour, Qu’est-ce qu’on va penser de nous se déploie comme un retour de Lucile Coda dans la maison où elle a grandi. Dans une forme simple mais précise, avec une confiance absolue dans son sujet et ses protagonistes, ce film n’est pas un film sur des personnages, en l’occurrence les parents de la réalisatrice, mais un film construit avec elleux. Nous avons été saisis par la façon dont Lucile Coda traduit cinématographiquement cette relation de distance et de proximité avec son père Philippe et sa mère Viviane. Loin des récits convenus de transfuge de classe, le film interroge avec une grande justesse et sensibilité la violence sociale de notre société contemporaine et l’hypocrisie de la méritocratie. En se construisant dans la durée, le tournage change des dynamiques à l’œuvre au sein d’une famille. Ce film devient alors un lieu profondément émouvant de dialogue et de réparation. »

Jury Lycéen : Lola Convert, Marine Piffoux, Chloé Torchi

« Tout au long des séances, nous avons vu des films plus originaux les uns que les autres. Nous sommes ravies d’avoir participé à cette expérience unique et enrichissante qui nous a permis de découvrir d’autres horizons du cinéma. Nous tenons à féliciter tous les réalisateurs et réalisatrices pour leur travail et le temps qu’ils ont consacré à leur passion du cinéma. Avant d’annoncer notre choix du jury lycéen nous voulions adresser une mention à un film qui nous a montré la difficulté de faire ses études loin de sa famille et de connaître la solitude au quotidien. Étant bientôt étudiantes, ce film nous a particulièrement touchées et émues puisqu’il montre la réalité de la vie étudiante, comme le fait de manger des pâtes tous les jours en changeant la recette. Ce film montre l’avenir prometteur d’un réalisateur en devenir. C’est pour cela que nous délivrons une mention spéciale au film Désordre intérieur de Halim Haykal.

Pour cette 27e édition des Écrans Documentaires nous souhaitons décerner le prix à un film qui nous a énormément ému et nous a fait ressentir diverses émotions. Durant la projection, nous sommes passées des frissons au rire, du rire aux larmes et des larmes à l’admiration. Les personnages, la réalisatrice et toute l’équipe derrière ce projet ont façonné une œuvre qui va au-delà du divertissement, elle nous interpelle, elle nous anime. Ce film aborde différentes thématiques où nous pouvons toutes et tous nous reconnaître et qui nous aide à mieux nous assumer, comme le fait d’avoir des parents ouvriers, de subir une pression sociale et d’avouer son homosexualité. Nous avons apprécié la transparence de cette œuvre en nous montrant toute son authenticité : les moments de Joie, de dispute ou encore de silence. C’est pourquoi nous avons décidé de délivrer le prix lycéens au film Qu’est-ce qu’on va penser de nous ? de Lucile Coda. Nous tenons à féliciter toute l’équipe derrière ce projet, notamment Philippe et Viviane Coda, les parents de Lucile. Enfin, nous remercions toutes l’équipe de l’Espace Jean Vilar et le festival des Écrans Documentaires pour leur accueil et pour leur volonté de faire valoir la parole des lycéens au sein d’un festival. »

Jury Valdevy : Toussaint Adjati, Cédrick Bonnaire, Marie-Christine Decool, Mohamed Elarche, Grazziela Herchin, Myriam Nguyen, Karine Pardieu, Véronique Perrogon, Lucette Savier, Fatma Zrann

« L’univers robotisé où travaille Otto nous a sidérés: la nouvelle forme d’aliénation qu’il subit, la société déshumanisée et de surveillance qui se profile nous interrogent : c’est pourquoi nous attribuons une mention au film français En attendant les robots de Natan Castay.

Le film que nous avons choisi pour le Prix Valdevy est Mamá, de Xun Sero venu du Mexique. Nous avons été emportés par ce récit de vie, parce que c’est le regard d’un fils qui se questionne et filme la parole libéré de sa mère, parce que cet homme refuse de reproduire des schémas de violence, parce que ce film nous fait rencontrer et découvrir une communauté, parce que malgré son vécu douloureux cette mama incarne la résilience et porte un réel espoir, parce que ce film est accessible et que nous aimerions le partager avec nos voisins, nos voisines de quartier. »