En partenariat avec le Musée d’art contemporain du Val- de-Marne (MACVAL) dans le cadre de l’exposition PERSONA GRATA consacrée à la place de l’hospitalité dans notre société, les Écrans Documentaires propose des projections et des rencontres avec Sébastien Thiéry du Collectif PEROU, puis avec le cinéaste syro-palestinien Samer Salameh autour notamment de cette question de plus en plus tendue et clivante. Pour autant, malgré l’ampleur du chaos et la dépréciation des valeurs où la question humaine, l’entraide et la solidarité sont régulièrement bafouées, des résistances s’organisent. Résister sur le terrain à l’infamie, à l’ignorance, aux manipulations, aux idées reçues, aux injonctions de politiques froidement quantitatives : tel est, entre autres, l’engagement du PEROU. Cette association pluridisciplinaire qui regroupe des chercheurs, des architectes et des artistes a été conçue dès son origine comme un laboratoire. Comme le souligne son fondateur, Sébastien Thiéry, «le PEROU prend le parti de cultiver l’outre-ville avec celles et ceux qui y vivent repliés. Dans les jungles de Calais, à Avignon, à Rennes, dans les délaissés de Paris ou les bidonvilles de l’Essonne, nous nous installons pour ouvrir des chantiers de rapprochement avec la ville alentour… Nous rencontrons les personnes démunies à partir de leur puissance d’agir, de leurs espoirs démesurés. Nous partons du vivant.» Construire (avec les gens) donc, plutôt que détruire (contre eux). Partager, aussi, pour aider à reconstruire des familles qui subissent au quotidien, dans une hystérie croissante, l’exclusion sous toutes ses formes. La guerre, la destruction et l’exil sont au cœur de la vie et du documentaire 194. Nous, enfants du camp(2017) de Samer Salameh. Egalement comédien (mais aussi cadreur et monteur), il était, on s’en souvient, l’un des protagonistes du film d’Axel Salvatori-Sinz, Les Chebabs de Yarmouk (2013). Né en 1985 en Syrie, Salameh a grandi dans le plus vaste camp de réfugiés palestiniens, à Yarmouk, près de Damas. Accueilli actuellement à «l’Atelier des artistes en exil» (Paris 18e ), dont il faut souligner ici avec force la volonté d’aider ceux et celles qui ont tant perdu, le réalisateur accompagnera son premier long-métrage documentaire filmé dans son quartier de Damas pendant la révolution syrienne. Une projection qui sera précédée du court-métrage Atlantiques de Mati Diop, récit d’un jeune sénégalais rescapé d’une tentative de traversée de l’Atlantique.
— Éric Vidal
P E R O U Pôle d’exploration des ressources urbaines [Extrait du Manifeste – 1/10/ 2012] — Association loi 1901 fondée en octobre 2012, le Pôle d’exploration des ressources urbaines (PEROU) est un laboratoire de recherche-action sur la ville hostile, conçu pour faire s’articuler action sociale et action architecturale en réponse au péril alentour, et renouveler ainsi savoirs et savoir-faire sur la question. S’en référant aux droits fondamentaux européens de la personne et au «droit à la ville» qui en découle, le PEROU se veut un outil au service de la multitude d’indésirables, communément comptabilisés comme cas sociaux voire ethniques, mais jamais considérés comme habitants à part entière. Avec ceux-ci, le PEROU souhaite expérimenter de nouvelles tactiques urbaines – nécessitant le renouvellement des techniques comme des imaginaires – afin de fabriquer l’hospitalité tout contre la ville hostile. Alors que se généralise une politique aussi violente qu’absurde, action publique aux allures de déroute n’ouvrant que sur des impasses humaines – expulsions, destructions, plans d’urgence sans issues, placements et déplacements aveugles, etc. – le PEROU veut faire se multiplier des ripostes constructives, attentives aux hommes, respectueuses de leurs fragiles mais cruciales relations au territoire, modestes mais durables.
— Sébastien Thiéry
ATELIER des ARTISTES en EXIL — L’Europe assiste sur son territoire au plus grand mouvement de population de ses soixante-dix dernières années. Parmi ces personnes se trouvent des artistes contraints de fuir leur pays. Parce que réfugié n’est pas un métier, que le rôle de l’art est celui de dire et de montrer ce qui dérange et de faire entendre la voix des opprimés, que c’est à travers la voix de ses artistes que les cultures des pays en péril peuvent continuer à se perpétuer, il est important que les artistes puissent continuer à exercer leur art. C’est pourquoi l’atelier des artistes en exil se propose d’identifier des artistes en exil de toutes origines, toutes disciplines confondues, de les accompagner en fonction de leur situation et de leurs besoins, de leur offrir des espaces de travail et de les mettre en relation avec des professionnels (réseau français et européen), afin de leur donner les moyens d’éprouver leur pratique et de se restructurer.
— Association fondée et dirigée par Judith Depaule et Ariel Cypel
* En référence à l’ouvrage éponyme de Marielle Macé, Sidérer, considérer – Migrants en France, 2017.
Films

194. Us, Children of the Camp
Samer Salameh | 2017 | 90' | Syrie, Liban, Palestine
À partir de 2011, le camp de réfugiés palestinien de Yarmouk vu à travers un groupe de jeunes hommes et femmes. Entre des assauts militaires de l’État syrien à la violence accrue, le réalisateur et ses amis tentent de documenter leurs propres espoirs et épreuves, ainsi que les efforts exercés par le régime Assad pour coopter le mouvement de résistance et de libération palestinien.

Atlantiques
Mati Diop | 2009 | 16' | France et Sénégal
À la nuit tombée, autour du feu, Serigne, jeune dakarois, âgé d’une vingtaine d’années, raconte à ses deux amis son odyssée clandestine, récit épique de la traversée de l’Atlantique.

Considérant qu’il est plausible que de tels événements puissent à nouveau survenir
Sébastian Thiéry | 2014 | 28' | France
Au petit matin du 3 avril 2013, en lisière de la Nationale 7 à Ris-Orangis, des pelleteuses écrasent un bidonville où vivaient 140 citoyens européens de nationalité roumaine. Ici-même, sous l’égide du PEROU, habitants, riverains, architectes, artistes, chercheurs avaient inlassablement construit, dansé, et transformé l’espace du bidonville et des représentations qui s’y rapportent. Considérant qu’il est plausible que de tels événements puissent à nouveau survenir est un film-poème tourné dans le vif d’une action risquée contre l’aveuglement qui gouverne.

L’Ordre
Jean-Daniel Pollet | 1973 | 44' | France
Spinalonga (Grèce). Cet îlot abrite une forteresse. En 1904, le gouvernement grec en fait le lieu de relégation de ses lépreux. Les habitants vivent en relative autonomie, jusqu’en 1956. En 1973, Raimondakis, enfermé pendant plus de trente ans, raconte.
Séances
8 novembre 2018 à 16h00
Espace Jean Vilar
- L’Ordre
Jean-Daniel Pollet | 1973 | 44’ | France - Considérant qu’il est plausible que de tels événements puissent à nouveau survenir
Sébastian Thiéry | 2014 | 28’ | France
8 novembre 2018 à 20h00
Espace Jean Vilar
- Atlantiques
Mati Diop | 2009 | 16’ | France et Sénégal - 194. Us, Children of the Camp
Samer Salameh | 2017 | 90’ | Syrie, Liban, Palestine